Retour
sur le colloque « Boucles: voyages temporels et paradoxes
causaux » (Poitiers, 4-6
juin 2026)
Les boucles temporelles sont courantes
en fiction. Courtes et ponctuelles, elles enrichissent le récit ou offrent un
contrepoint générique ; étendues, elles explorent la subjectivité, comme dans Rashomon
(Kurosawa, 1950), opérant comme des spirales ou des « plis » deleuziens, en
révèlant la complexité du multiple. Parfois libératrices, initiatiques,
créatrices d’uchronies, les boucles autotéliques peuvent cependant créer des
« limbotopies » (Gomel et Shemtov, 2018), se faire outils de contrôle
(métavers, simulations), devenir sources de manipulation ou de surveillance. En
régime postapocalyptique, les machines peuvent ainsi tourner en boucle, ultime
vestige de l’humanité achevée. Bref, les boucles représentent un véritable
laboratoire narratologique, et un objet pertinent pour appréhender la fiction –
à travers les métalepses, les préconstruits temporels, les questions de
subjectivité, de construction d’univers, de réception et de clôture des œuvres.
Ce sont ces diverses modalités des
boucles qui ont constitué le sujet du colloque qui s’est tenu à l’Université de
Poitiers les 4, 5 et 6 juin 2025. Ayant réuni 22 intervenants de plusieurs
universités françaises et étrangères (Canada et Australie), cet événement a été
organisé avec le soutien du laboratoire FoReLLIS, de l’Université de Poitiers,
de la Région Nouvelle-Aquitaine, et de la SIRFF, laquelle était fort bien
représentée par plusieurs de ses membres, dont sa Présidente. Le colloque
s’inscrivait dans un cycle intitulé « Temporalités », porté par
Hélène Machinal et réunissant plusieurs universités françaises et canadiennes.
La première conférence plénière,
présentée par Françoise Lavocat, a offert une exploration diachronique des
narrations circulaires, s’étendant du XVIIe siècle jusqu’aux romans
et séries contemporains. La conférence d'Elaine Desprès a abordé le phénomène
des séries, en démontrant la connexion intrinsèque entre les boucles
temporelles et la mort. Les communications ont soulevé des questions diverses
sur les boucles temporelles, notamment leurs modalités esthétiques et formelles
(l’étude de l’hybridation texte/image, le montage, chronotopes singuliers), ou
leurs implications politiques (uchronie, histoire alternative, traumas
individuels/collectifs). Des questions plus « architextuelles » ont été
soulevées, concernant les effets génériques et d’évolution au long cours dans
les cycles, sagas, univers étendus.
Les actes de ce colloque seront
publiés dans un double numéro de la revue Otrante (Presses
universitaires de Rennes). Nous
attendons avec impatience le prochain colloque du cycle «
Temporalités » !